Route secondaire
Au bord de la route, qui ne fut jamais principale, voyelles d’enseignes et volets cassés pendent. Les ciments s’écaillent et une fleur, rose parfois, pâle et têtue, insensible aux gaz de l’ère automobile, pousse dans le moindre écart entre les pierres. Il arrive que certains murs tressaillent, que des pièces sonnent creux, au passage, en excès de vitesse, d’un lourd camion de transport d’animaux à viande. On cherche, malgré la saleté des vitres, à voir les intérieurs. Où était une mercerie, des poupées en laine, assises de guingois sur la corniche d’un meuble à nouveautés, imitent des petites mortes qui s’empoussièrent. Une venelle, typique, ombrée par des maisons mazoutées, sert depuis toujours de point de traversée : les cyclistes, engagés à plusieurs dans un effort en plaine contre le vent, soulèvent les mouches, malades d’excitation, du tapis d’épingles d'une bête toute plate.